12 juil. 2008

Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois.

C’est en lisant l’excellente analyse d’André Rouillé « Un art aveugle au monde » que m’est venu en tête ce fameux proverbe, au moment où une vedette internationale investit le château de Versailles et ce, pour reprendre les dires de ladite vedette, même plus par provocation ! Mais écoutons André Rouillé : « Une évidence s’impose chaque jour plus nettement. La culture en général, et l’art contemporain en particulier, sont en train de sombrer dans un aveuglement au monde. C’est-à-dire de perdre leur raison d’être. Cette proposition sans doute alarmiste n’est pas dictée par une quelconque nostalgie, ni par un désir rétrograde de retourner aux temps pas si éloignés où l’art devançait le cours du monde, où il en préfigurait les grands mouvements. Il n’est évidemment pas question de restaurer les pratiques artistiques séculaires. Non, c’est à l’inverse la sensation que l’art est en retard sur le monde qui suscite cette idée qu’il serait devenu aveugle à ses bouleversements. Comme si le monde était soudain devenu trop grand et trop rapide pour l’art, même pour celui dont les expressions sont les plus avancées. Comme si le monde s’était déployé plus vite que l’art. Ou que le monde, à l’époque des réseaux et du marché planétaire, avait condamné l’art à l’insignifiance en l’enfermant dans les logiques paresseuses de la marchandise, du divertissement et du luxe.… »
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2 juil. 2008

Don’t stop running, boys and girls !

Lors de l’exposition « Work N°850 », la Tate Britain de Londres élève au rang de l’art la course à pied. Selon les organisateurs, l’idée est des plus simples. Toutes les trente secondes, un coureur s’élance sur les 86 mètres de la Galerie Duveen. Après chaque course, un temps équivalent est réservé à un temps de pause, pendant lequel la galerie, de style néoclassique, est vide. Les coureurs sont choisis parmi différents milieux de Londres et chacun d'entre eux doit donner l’impression de courir « comme si sa vie en dépendait ». Il est encore fait appel à la fameuse beauté, notion polymorphe légitimante, puisque « la beauté du mouvement humain » est proposée « dans sa forme la plus pure », cette beauté inoubliable traçant par la même occasion une ligne droite entre deux points : le point de départ du coureur et le point de son arrivée.
N’y a-t-il pas de quoi être décoiffé par le passage du souffle des coureurs et d’être emporté par la portée hautement métaphysique de l’idée proposée ? Les organisateurs, ayant gardé les pieds sur terre, n’en n’oublient pas pour autant d’inviter les visiteurs à ne pas gêner les coureurs, et ce, pour des raisons de sécurité.
Vous pourrez participer à ce moment ludique et initiatique jusqu’au 16 novembre 08. N’oubliez pas, si vous y allez, de jouer le jeu : cela fait partie des règles. Allez-y comme si votre vie en dépendait, entre les deux points qui vous intéressent : le moment de votre naissance et celui de votre mort. Entre les deux, ne s'agit-il pas de remplir et de faire du vent, beaucoup de vent ? Cette exposition (?) devrait vous y aider… La partie continue… (Michel De Caso)